8 mars journée internationale des droits des femmes

Chaque histoire a besoin d’un narrateur pour pouvoir être racontée. Si l’on nous apprend sagement que deux types de narration existent :

- La narration objective à la troisième personne du singulier où la voix qui s’exprime est neutre et ne correspond pas à quelqu’un en particulier

- La narration subjective où les événements nous sont contés par la voix d’un ou de plusieurs personnages.

Comment faire cependant pour qu’une narration le soit réellement, objective ?
On ne le peut pas, car au-delà des personnages d’un roman, le point de vue et la voix de l’auteur s’expriment, reflets d’une époque dans laquelle celui ou celle-ci se place et contre laquelle il peut se révolter ou bien au contraire en valider tous les diktats.
L’objectivité n’existe pas, tout est et sera toujours biaisé par le regard. En premières victimes de ces regards et ce depuis la nuit des temps avec cette légère tendance à nous considérer comme des inférieurs et des objets, les femmes.
Une introduction peut-être un peu violente mais cela tombe bien car de la violence, nous n’allons pas en manquer.

Femmes : victimes car coupables

Qu’est-ce qu’une femme ? Une question un peu vaste à laquelle des hommes tentent parfois de répondre, de même que d’autres femmes. Une question aux réponses multiples et changeantes également, tout comme l’interrogation suivante : qu’est-ce qu’un homme ? Mais laissons ici les questions de genre pour se demander une autre chose :

Dans l’esprit des autres, que doit-être une femme ?

1) Coupable
Permettez-moi une disgression non pas littéraire mais historique avec deux affaires non réellement élucidées mais qui pourtant ne manquent pas de coupables.

a) Les sorcières de Salem
Elles ont nourri la littérature et l’imaginaire, ces sacrées sorcières. Femmes de notables, filles de bonnes familles, simples servantes parfois aussi, dans l’Amérique puritaine de la fin du XVIIe siècle, elles n’avaient pas d’autres rôles que de tenir la maison, faire des enfants et craindre maîtres, pères, frères et époux autant que l’on craint un Dieu Divin.

Tout un programme…

Comment faire pour leur porter préjudice ? Les traiter de sorcières, dire qu’elles dansent nues au soir venu pour appeler Satan et profiter enfin d’un homme pour les faire jouir. Dire qu’elles empoisonnent, car le savoir entre leurs mains est dangereux, une menace pour autrui, dire qu’elles maudissent, amènent le malheur sont nuisibles…

A l’image d’Eve après tout, première coupable ayant croqué la pomme, et à l’image de Lilith ou Jezabel , contre-nature car ayant choisi de se révolter.

Comment faire pour rétablir l’ordre ? Trouver la femme, la capturer et l’éliminer. Tortures, trahisons, délations, exécutions… Les sorcières de Salem ont fait couler beaucoup d’encre et nourri l’imagination collective.

La sorcière est devenue une femme refusant les hommes car trop libre, et devant être punie pour cela.
Vous ne voulez pas être une coupable ? Ne soyez pas une sorcière…

Désormais, la littérature féministe se réapproprie ce terme, comme l’excellente Mona Chollet avec son essai aux éditions Zones « Sorcières, la puissance invaincue des femmes ».

Le terme « sorcière », soit hyper sexualisé avec ces femmes en minijupes noires, décolletés plongeants et chapeaux pointus, soit dégradant avec ces vieilles aux corps difformes et aux visages couverts de verrues n’est plus un verrou pour enfermer la femme dans une image ou une autre, mais une identification et plus encore, une identité retrouvée, arrachée aux regards et surtout au biais masculin.

b) Jack l’Eventreur
Passons de l’autre côté de la Manche et avançons de quelques siècles pour la fin du XIXe. Attention, c’est brumeux…
Whitechapel à Londres est un quartier pauvre, ouvrier. On y boit beaucoup trop et on fait ce que l’on peut pour gagner de l’argent quand celui de l’usine ne suffit plus. Autrement dit pour les femmes : on se prostitue. Ce n’est pas rare pour les mères de famille d’ainsi courir le pavé le soir. Pour certaines, c’est un métier en elle-même, pour d’autres, un travail à mi-temps en plus d’un autre qu’elles occupent déjà.

Il n’est pas rare qu’une prostituée meure de façon violente, on ne s’en émeut même plus en vérité. Comme peuvent le souligner avec mépris les classes supérieures : c’est la vie qu’elles ont choisi. Etrange comme la notion de « choix » est souvent mal utilisée lorsque le corps de la femme en est l’objet…

Arrive un homme avec un gros couteau, et non ceci n’est pas une métaphore. Cette fois-ci, on s’interpelle, on s’interroge : qui donc estourbit comme ça les filles de mauvaise vie ? C’est qu’il leur en a pris des choses, le bougre. C’est qu’il les mutile aussi, qu’il leur vole même quelques morceaux, comme si les tuer ne suffisait pas.

Il s’acharne…

Les journaux se feront un malin plaisir en se jetant sur l’enquête et s’interrogeront. Evidemment, la poursuite du coupable n’est pas aussi intéressante que de s’attarder sur le misérabilisme certain de la vie des victimes. Dépecées une première fois par leur assassin, elles le seront une seconde par la presse qui fera ressurgir chaque zone d’ombre de leurs vies tragiquement prises : alcoolisme, violence, prostitution… Ne l’ont-elles pas cherché, après tout ?

Encore aujourd’hui, on ne sait pas qui est Jack l’Eventreur mais comme souvent par la suite, à chaque agression mortelle ou non concernant une femme, que le responsable soit attrapé ou pas, c’est bien elle que l’on désigne coupable.
Et lorsque les écrivains s’emparent des drames humains et des recoins les plus sombres de l’âme humaine. Que se passe-t-il ?
Les romans et histoires policières permettent-ils d’enfin ouvrir le regard sur la place des femmes dans la société ?

2) Victime
a) Le fantasme
Le roman noir, à l’instar du film noir, ne peut se lire sans que nous prennent le nez d’effluves de cigarettes dans des jeux d’ombres et de lumières. On perçoit un air de saxophone, l’écho d’une voix masculine toujours un peu brusque… peut-être bien celle d’Humphrey Bogart lui-même, et le claquement de talons aiguilles.
Du noir et du blanc et, en touches de couleur, le rouge des lèvres comme le rouge du sang. Parlons de James Ellroy à présent !
Le Dahlia Noir fait écho à Jack L’Eventreur et ses méfaits, avec ce corps de femme complètement mutilé, retrouvé au hasard d’un terrain vague.

Une enquête pour retrouver le ou les coupables de ce crime particulièrement graphique, mais aussi un roman social avec cette peinture sombre et glaçante d’une Los Angeles monstrueuse, le Dahlia Noir est un livre fait de secrets et de questions sans réponses. La Femme est ce corps à qui il faut redonner une identité, et surtout une vie afin de retrouver son meurtrier. Fantasme muet et romantique d’une victime privée d’avenir bien que dans la fleur de l’âge, Eurydice hollywoodienne (car elle rêvait d’être actrice) qu’un Orphée Enquêteur tente désespérément de ramener à lui, Elizabeth Short est sulfureuse, condamnée, lointaine.
Elizabeth Short ne peut pas être sauvée, pas même alors qu’au cours de l’enquête arrive une femme, son portrait craché. Quelle triste Eurydice notre Orphée a-t-il ramené ?

Un roman de questions pour James Ellroy, l’écrivain. De questions et de questionnements car le Dahlia Noir est inspiré d’un véritable crime jamais vraiment élucidé. En choisissant Elisabeth Short comme sujet de son histoire, Ellroy fait de la jeune femme, la Muse des romans policiers et de celles et ceux hantés par un crime jamais élucidé.
Comme Ellroy lui-même, dont la mère fut assassinée alors qu’il n’avait que dix ans sans que le coupable ne soit attrapé. Deux visages de l’imaginaire féminin dans le regard des hommes se confondent alors : la jeune fille de mauvaise vie devient à travers ce livre, le miroir de cette figure maternelle à qui Ellroy n’a jamais pu faire ses adieux.

b) L’art de la manipulation (Gone Girl)
Comment se raconte une femme, comment se raconte un couple ? Notre société aime le voyeurisme, on ne peut le nier. Quoi de mieux que ces couples parfaits desquels on peut décortiquer le moindre fait et geste ? Cela nous nourrit, nous, notre insatiable curiosité…

Et les thrillers et romans policiers savent jouer de cela. Avec les Apparences, Gillian Flynn nourrit notre fantasme de la vie de couple absolument parfaite que l’on peut rêver d’avoir, mais aussi la satisfaction mesquine de constater que tout n’est pas aussi idyllique qu’on le laisse entendre. La justice n’est pas rendue à la femme disparue de ce couple ; ce que le lecteur ressent, c’est s’évader dans un quotidien soudain bien plus terrible que le sien.
Juger, ce plaisir coupable et comme souvent, une femme est le point de départ de cet exutoire. Charmant rôle, n’est-ce pas ? Un masque de plus parmi tous ceux qui nous sont prêtés. Autant de masques et pas un seul pour se rapprocher de la vérité alors ?

L’égalité ?
3) Egalité
a) Entendrons-nous toujours les agneaux pleurer ?

« Alors le FBI fait comme les autres, il embauche des femmes … ah ! ah ! »

Nous sommes en 1988 et Thomas Harris publie un roman capable de révolutionner le genre du roman policier et surtout le personnage du tueur en série : Le Silence des Agneaux. Car c’est bien avec Hannibal Lecter, Hannibal le cannibale, que l’on se souvient de ses livres..

Si Dragon Rouge présentait en 1981 une joute d’esprit entre un Hannibal encore timide et Will Graham, il faudra attendre l’arriver de la (future) agent Clarisse Starling dans le Silence des Agneaux pour que le personnage d’Hannibal puisse exister et rayonner de toute son aura maléfique. Car, aussi intelligent et machiavélique soit-il, que serait que le Docteur Lecter sans l’Agent Starling ?
Plus personnellement, j’ai lu Thomas Harris adolescente, ce qui forgea mon amour des romans policiers bien sombres, ainsi que des histoires de tueurs en séries. Ces livres, le Silence des Agneaux en tête, je les ai lu, relu et rerelu avec à chaque fois l’image d’une Clarisse Starling forte, indépendante et capable de s’imposer dans un monde d’hommes.

Les yeux de l’innocence…

Clarisse Starling, bien que presque 34 ans se soient écoulés depuis la parution du roman et que le monde, la société, ait sensé avoir changé, demeure une sœur jumelle.

Elève à l’académie du FBI, diplômée en psychologie et en sciences du comportement, on la rabaisse à cause de son sexe : elle n’est pas l’égale de ses camarades masculins malgré toutes ses qualifications, elle est un quota.
Mandatée par le directeur du FBI pour interroger un tueur en série, Clarisse doit d’abord montrer patte blanche auprès du directeur de l’asile psychiatrique. C’est-à-dire sourire à ses blagues misogynes pour ne pas dire simplement beauf, et subir des invitations pressantes à diner et passer la soirée ailleurs plutôt que de travailler. Répondre trop brusquement, c’est se voir le risque de recevoir des bâtons dans les roues quand bien même la jeune femme est là pour une raison officielle… Elle enrage, elle subit.

De la même manière que sa rencontre avec le terrifiant Docteur Lecter qui se targue d’être un homme de goût et de culture, et ne supportant pas la moindre incivilité, commence par un compliment sur ses vêtements et son parfum. Compliment qui se transformera en moquerie acerbe sitôt que Clarisse fera quelque chose ne plaisant pas à Hannibal Lecter. Le physique, utilisé pour la mettre en valeur dans le regard masculin, devient alors une arme pour la rabaisser, l’humilier.
Clarisse Starling est le punching-ball vivant des émotions et des envies de ses comparses masculins et se veut correspondre à une certaine idée de ce que doit être une femme forte pour ces messieurs : Une femme capable d‘encaisser humour et remarques sans se démonter ou s’effondrer. Tout n’est pas que négatif pour autant, car d’autres auteurs et surtout d’autres autrices vont peu à peu s’affirmer dans le genre du thriller.

b) Dolores Redondo

Une bonne occasion pour moi de vous présenter Dolores Redondo avec sa trilogie du Baztan.
Direction le pays basque espagnol, un peu de soleil nous fera du bien.
Dans un cadre géographique particulier, celui d’une vallée où les traditions sont fortement ancrées dans le quotidien et où l’art de l’entre-soi reste encore vif, Dolores Redondon nous présente le personnage d’Amaia Salazar.

Qui est donc Amaia ?

Une femme avec un métier d’homme, comme ce que l’on pensait de Clarisse Starling avant elle ?
Ou une femme avec un métier, simplement ?

Comme son homologue américaine au FBI, Amaia devra faire face à son lot de meurtres et de tueurs en série mais l’épreuve la plus dure sera bien de se construire elle-même.

En trois tomes, trois enquêtes, Amaia aura à se réaliser seule, quitte à plonger dans son propre passé pour cela et évidemment, affronter ses démons. Plus que les meurtriers et les hommes en général, son adversaire se révélera une femme.
Une femme brimée et modelée par des siècles de regards masculins, une femme à l’esprit comme un poison, enchaînée par le patriarcat ambiant de la vallée et par le même temps libre ou se pensant l’être, guidée vers les travers les plus obscurs de sa personnalité dans l’espoir de ne pas correspondre enfin à ce que la société veut d’elle.

Se libérer de cette femme est pour Amaia nécessaire, vital, car cela concerne sa propre existence, son identité. Les chaînes d’un passé trop proche qu’elle se doit de briser pour ne pas devenir le monstre qu’elle craint et recommencer le cercle vicieux de la violence. L’héroïne chez Dolores Redondo, doit donc se redéfinir et se déconstruire tout autant dans l’écriture et la réflexion de l’autrice, que dans l’intrigue même avec un personnage principal devant passer par ce cheminement mental pour accéder à la vérité, celle derrière les meurtres et les mentalités des tueurs, que SA vérité pour exister en tant que femme à côté de son travail.

Dans un quatrième tome un peu particulier par rapport à la trilogie principale, Dolores Redondo emmène son héroïne Amaia aux Etats Unis, avec le FBI, comme pour appuyer un peu plus la filiation avec Thomas Harris. Comme dans Dragon Rouge, Amaia aura à faire face à une enquête où l’éclatement de la cellule familiale est la clé de tout et, comme dans le silence des agneaux, il lui faudra pour cela apprendre à s’ouvrir et se livrer à un personnage masculin en position de pouvoir. Personnage qui pourrait bien pourtant se révéler le plus vulnérable des deux personnages…

Mais dites-moi, est-ce le flic ou le meurtre qui fait le roman policier ?
Non, éloignons-non alors du genre bien codifié du thriller pour se rapprocher du roman en général, qu’il soit inspiré de faits réels ou non. Le but ne devient plus de raconter un meurtre ou de trouver un coupable, mais de dénoncer.

4) Fiction et réalité
a) Joyce Carol Oates

Dans un roman, Joyce Carol Oates nous raconte, une agression. Un viol. Parce que c’est le soir de fête nationale, le 4 juillet aux Etats unis, et que donc on sort faire la fête. Que l’on boit trop, que l’on rentre tard, qu’il fait chaud, qu’il y a ce parc avec ce hangar et cet abri à bateau, et cette femme qui passe, ne désirant juste que rentrer chez elle. Oui mais voilà, des hommes ont bu, l’accostent.

La laissent pour morte.

« Viol : une histoire d’amour », le livre s’appelle ainsi. Pourquoi ? Parce qu’il ne se contente pas de cette agression.
Bien sûr on nous raconte le procès, la farce organisée par l’avocat des agresseurs. Les visages bien rasés et bien coiffés des violeurs sont opposés à la tenue que portait Tina, la jeune femme. Malheureusement, on préfèrera toujours accuser une jupe ou un décolleté plutôt qu’un homme bien mis et bien rasé.

La seconde agression de Tina, c’est ce procès. Pas un viol, mais un meurtre, une tentative. On veut la tuer elle, dans tout ce qu’elle a ressenti, dans tout ce qu’elle a subi. Nier ce qu’elle est, pour lui donner un autre visage : la séductrice.
Dans son traité « Histoire du Viol du XVIe au XXe », Georges Vigarello rappelle que dans l’histoire, les procès-verbaux parlaient bien de « séduction » avec une fausse pudeur nauséeuse pour qualifier les agressions sexuelles. Des séductions toujours encouragées par les femmes victimes, dont le « Non » ne possède alors aucune valeur juridique si l’on trouve à redire de leur comportement ou de leur façon d’être habillées.

C’est exactement ce qui se passe dans ce roman, la femme n’est pas la victime mais la séductrice. Où est l’histoire d’amour donnée par le titre alors ?

Hé bien je vous avais promis un flic. Lui, dont le rôle est de rassembler les preuves et relier les faits pour que se tienne un procès, va se retrouver tout aussi démuni. Il n’a plus aucun pouvoir à présent que la machine juridique est lancée, alors le flic va laisser la place à l’homme, celui capable d’empathie, celui capable de dire à Tina qu’elle n’est pas une coupable, qu’elle n’est pas une séductrice, qu’elle n’est pas non plus un fantasme de victime duquel il ne lui faut plus s’éloigner pour survivre.
Celui capable de voir la femme, avec son passé et son futur à imaginer.

Celui qui décide de ne pas se définir par sa fonction de flic mais bien d’être un homme et, alors que tout le monde se détourne d’elle ou lui crache dessus, de l’aimer.
« Viol, une histoire d’amour », car un traumatisme, est une fracture et que s’il y a un avant, avant tous les bouts de morceaux de soi que l’on retrouve brisés, il y a aussi un Après.

Mais ce n’est pas le seul livre avec un titre évocateur dont je voudrais vous parler.

b) Philipe Besson

« Ceci n’est pas un fait divers », de Philippe Besson. Sur la couverture, des fleurs délicates…

Qu’est-ce qu’un fait divers ? Un grand titre à la une qui passe en boucle parfois dans les journaux télévisés, ou bien au contraire un mince entrefilet au hasard des pages du journal. Un fait divers, ce sont des nombres ou des statistiques comme par exemple

« 26 ».
26 femmes tuées sous les coups de leur conjoint depuis le 1er janvier 2023. A part cela, pour beaucoup, le féminicide n’existe pas
« Ceci n’est pas un fait divers » s’intéresse non pas aux nombres que l’on énumère, mais aux noms derrière. Les femmes, les disparues, et celles et ceux qui restent, dépossédés de l’être qu’ils pleurent, qui n’en devient plus qu’un chiffre dans le grand bal des journaux télévisés. Un nom que s’approprie le pays entier par simple désir de sensationnalisme.
Pas de retournement de situation pour une intrigue à mener tambours battants ici, mais un chapitre soudain coupé au milieu d’une phrase, celui de la vie de ces victimes que l’on n’a pas voulu écouter. Pour les familles derrières, se reconstruire est une priorité.
Ceci n’est donc pas un fait divers mais encore une fois un avant et un après avec le même désir : se reconstruire avec le vide, et l’absence de tout ce qui a été arraché.

Tant que l’on fera rimer agression et séduction, meurtre et passion, nous ne saurons parler de femmes dans les romans simples comme les romans policiers.
Tout est sans cesse à reconstruire et à déconstruire, et parfois, la plus belle énigme d’une histoire est celle d’un silence donné et respecté plutôt qu’interprété.
Ainsi, avec ses héros Guillaume de Baskerville et le jeune novice Adzo, Umberto Eco parvient à résoudre le mystère de bibliothèques fantastiques et de sagesses anciennes disparues puis retrouvées pour finalement clore son intrigue sur une question sans réponse : le nom de la femme, le nom de la rose, qu’Adzo n’aura finalement jamais trouvé.
On pourrait en citer encore quelques autres avec la puissante Virginie Despente dans « Baise Moi » ou deux femmes violées se transforment en tueuses en série élaborant des stratagèmes violents en réponse à la violence de l’inconsidération de l’horreur subie, lâche, violente, criminelle.
Le film a longtemps été censuré en France. Trop sexe trop violent trop trash.
Dans « fille », Camille Laurens définit en profondeur ce qu’est une fille, celle qui déçoit « le père » de ne pas être un garçon.

Zoraïde Jobert